Pour toi…
483km, 44h52 à allures variées depuis 8
semaines, à raison de 4 sorties hebdo… et 42,195km à faire en moins de 3h20
pour boucler la boucle. Voilà l’introduction chiffrée de ma situation à la
veille de participer à mon 4ème marathon de Paris ce 7 avril 2013.
Le marathon : épreuve-reine, course mythique forçant le respect, l’humilité et le courage. Ce n’est peut-être pas tout à fait la définition que l’on retrouve dans le Larousse mais ce sont souvent ces qualificatifs qui lui sont attribués dans une discussion entre runners.
- L’avant course
J’ai tiré de nombreux enseignements de
mon échec au marathon de Vincennes 2012 couru en 3h29. J’ai notamment en
mémoire une mauvaise gestion des ravitaillements, la ceinture porte-gourdes qui
alourdit, une tenue trop chaude et le manque de concentration. Fort de cette
expérience et d’une préparation réussie au cours de laquelle j’ai notamment
battu mon record sur semi (1h31’15), je compte bien pulvériser ma meilleure
marque de 3h27’21 réalisée au MDP 2012. Je garde le même objectif qu’à
Vincennes, descendre sous les 3h20.
- Le jour J
7h00. Je retrouve mon binôme, Laurent,
sur la ligne 1 à Gare de Lyon. Nous en profitons pour réviser nos gammes :
entre 4’42 et 4’44/km jusqu’au 30ème puis accélération douce et
progressive jusqu’à la fin. Si possible…
Arrivés Porte Dauphine, nous apercevons
maintenant un beau soleil. Certes, il ne fait pas chaud (2°C) mais l’absence de
vent nous prédit une matinée quasi idéale côté météo. Direction les consignes
pour passer la tenue de combat. Et là, panique. Impossible de mettre la main
sur mon téléphone. Disparu, envolé! Il a probablement glissé de ma poche lors
du dernier arrêt technique pause pipi. Je demande à Laurent de garder
mes affaires et me faufile tant bien que mal parmi les participants pour sortir
de la zone et retourner à l’endroit où j’espère le retrouver. Je me serais bien
passé de cet échauffement ! Heureusement, après quelques interminables
minutes à labourer des yeux chaque cm² de cette parcelle, j’aperçois enfin mon
appareil dissimulé dans l’herbe. iSoulagé…
Je reprends mes esprits et repars en sens
inverse rejoindre Laurent. Direction le sas de départ.
8h25. Nous sommes bien placés dans notre
sas « 3h15 », sur le côté droit de la chaussée. J’aperçois Gianny,
qui vise peu ou prou le même chrono que nous. Génial, nous allons pouvoir
partir tous ensemble.
- 0-5km : 23’31 (4’42/km) – Position: 5787
8h45. Le coup de feu est donné. Nous
mettons moins de 6 minutes pour franchir la ligne. Le départ en demi-sas rend
la course très fluide. Ainsi, nous pouvons viser notre allure cible de 4’42
sans difficulté. Gianny, quant à lui, semble vouloir partir sur des bases plus
élevées. Bonne chance, l’ami ! Rien d’autre à signaler sur cette première
portion qui nous conduit des Champs Elysées vers Bastille.
- 6-10km : 23’38 (4’43/km) – Position: 5717
J’ai tendance à être trop rapide. Les kms s’enchaînent de manière très irrégulière,
entre 4’36 à 4’48. Un rapide, un lent, un rapide… Je n’arrive pas à stabiliser l’allure et embarque mon
compagnon de route dans ce changement incessant de rythme. Ca m’ennuie mais dès
lors que je n’ai pas les yeux rivés sur ma montre, je vais trop vite.
Heureusement, Laurent est là pour me rappeler à l’ordre un km sur deux !
Passage au 10K : 47’09.
- 11-15km : 23’08 (4’37/km) – Position: 5347
Nous sommes maintenant sur notre terrain
de jeu préféré, le bois de Vincennes. Mais au lieu d’être rassuré par des
repères connus, je suis préoccupé par une raideur ressentie dans les deux
mollets depuis le 10ème. Comme un début de crampes. Je décide de
changer de foulée en délaissant l’attaque médio-pied travaillée depuis des
semaines à l’entraînement au profit d’une approche par le talon. Beurk !
Mais j’ai l’impression de ne pas avoir le choix si je veux poursuivre. Je
n’aurais jamais imaginé talonner si tôt dans la course mais le résultat est
concluant et la douleur passe vers le 13ème km. C’est d’ailleurs à
cet endroit que j’aperçois Sandrine, venue encourager tous ses potes de la
Runnosphère.
Côté allure, ça ne s’arrange pas. En
modifiant la foulée, j’ai considérablement augmenté la vitesse. Les 11ème
et 12ème sont effectués en 4’33 et 4’31. Du grand nimportnawak. Par
ailleurs, le bracelet chronométrique
judicieusement confectionné et porté par Laurent semble contredire les
données de nos GPS. Nous décidons de dorénavant nous fier le plus possible à
lui. Passage au 15K : 1H10’17.
- 16-20km : 23’36 (4’43/km) – Position:
5426
Nous arrivons sur l’une des parties les
plus roulantes du parcours, avenue de Gravelle puis la rue de Charenton. Notre
vitesse est enfin stabilisée et je commence à me sentir vraiment (trop) facile
à l’allure cible. Je mets ça sur le compte de ce long faux plat descendant et
reste bien concentré et vigilant. Je n’oublie pas la récente alerte aux
mollets. Côté plaisir, c’est un peu mitigé pour l’instant. Je suis vraiment
heureux de partager ce MDP avec mon binôme mais je m’en veux d’avoir mis autant
de temps à trouver la bonne cadence. Du coup, je n’ai quasiment pensé qu’à ça
pendant près d’1h et ½. Il faut que ça change. Ce n’est pas tous les jours
qu’on court le marathon de Paris quand même. Profitons !
- 20-25km : 23’48 (4’45/km) – Position:
5373
Passage au semi : 1h39’05. C’est, à 5
secondes près, le même pointage que lors du marathon de Vincennes. Mais
aujourd’hui, je suis obligé de ralentir pour rester dans la cible. Je me sens
très en forme et commence à prendre beaucoup de plaisir à courir alors que le
toboggan des quais se profile à l’horizon. Passage au 25K :
1H57’41.
- 26-30km : 23’42 (4’44/km)
Nous entamons l’enchaînement des tunnels
sur les quais. Une succession de faux-plats montants et descendants. C’est
généralement à cet endroit que les coureurs partis trop vite ou en méforme
commencent à piocher, voire marcher. L’élastique se tend quelque peu entre
Laurent et moi. Il est ennuyé depuis quelque temps par ses tendons d’achille et
même s’il gère parfaitement la vitesse ciblée, il doute de sa capacité à
accélérer dans les prochains kms. De mon côté, tout va bien. Je profite
maintenant de tout : la Seine, Notre Dame puis un peu plus loin la Tour
Eiffel, le soleil, l’ambiance… et les rencontres. Je viens de rattraper Ray, le
célèbre blogueur DC Rainmaker. Nous discutons brièvement puis poursuivons
chacun notre route. Très sympa en plus d’être très intéressant à lire.
J’ai la sensation de ne pas fournir assez
d’effort tellement je suis facile à l’AS42. J’ai en tête la formule de Marcel,
meneur d’allures, qui décline le marathon en une épreuve de 3*14km où tout
commence au 28ème. Après avoir fait le point avec Laurent, je le
préviens que je vais commencer à accélérer. Passage au 30K :
2H21’23.
- 31-35km : 23’09 (4’37/km) – Position:
4283
Crédit photo: Pathé |
Pathé, notre running mate, avait prévenu
de sa présence sur le bord de la route aux environs du 30ème,
histoire de briser le mur s’il l’apercevait en arrivant sur les lieux. Quel bonheur
de le voir ici et de prendre ses généreux encouragements avant la délicate
portion Molitor-Auteuil-Fortifications. Merci Dude.
Laurent et moi sommes maintenant chacun
dans notre course, à l’approche du moment de vérité. Je suis parti au 28ème
et cours dorénavant aux environs de 13km/h. J’ai la chance d’avoir comme
repère au loin un meneur d’allures 3h15 parti 2’ après nous et qui nous a
doublés en cours de route. Je décide de tenter de le rattraper progressivement.
Passage au 35K : 2H44’32.
- 36-40km : 22’26 (4’29/km) – Position:
3494
Avenue de St Cloud dans le bois de
Boulogne. L’allure ne faiblit pas. Je suis systématiquement en dessous de 4’30.
Je garde un œil sur mon guide à la flamme jaune mais je suis attiré devant moi
par un coureur à l’attitude et au camelbak familiers. C’est Gianny! Les dents serrées,
il lutte contre la souffrance avec un courage énorme. Il est parti vite et c’est
au mental qu’il va aller chercher son RP. Une attitude exemplaire. Chapeau bas.
Ca y est. J’ai réussi à recoller au meneur
d’allures. Il booste son petit groupe à merveille. Je sens monter l’émotion…
Passage au 40K : 3H06’58
- 41-42.195km : 9’36 (4’21/km) – Position:
3253
C’est l’heure du sprint final. Jamais je
n’ai eu de telles jambes à l’approche de la ligne d’arrivée d’un marathon. Les
sensations sont exceptionnelles. Je sais que je vais pulvériser mon record en
réalisant un négative split (2ème semi couru plus vite que le 1er).
Mais au-delà de ça, je me sens porté par le logo de l’ARTC que j’ai sur la
poitrine. Je me dois de me dépasser, de me transcender. En hommage à celle qui
m’a tout donné et tout appris. Temps final : 3H16’34.
- Le bilan
Place catégorie SEH : 1587/13577
Allure moyenne : 4’39/km
Vitesse moyenne : 12,88 km/h
Negative split : -1’36
Près de 11’ de moins que mon désormais
ancien record personnel. J’ai du mal à réaliser que j'ai doublé plus de 2000 coureurs sur la seconde partie du parcours. J’étais resté sur une
expérience difficile à Vincennes et aujourd’hui, tout s’est parfaitement passé.
Cette fois-ci, c’est avec une grande fierté que je reçois la médaille puis me
dirige vers les consignes en espérant voir arriver Laurent le plus vite
possible.
Le voilà quelques minutes plus tard.
Victime de crampes et de son tendon d’achille à partir du 29ème km,
c’est au mental qu’il a fini, s’accrochant coûte que coûte pour aller chercher
un nouveau RP en 3H23’. Merci Partner pour toutes ces courses que nous
partageons ensemble. C’est un grand privilège de connaître ces moments. Je
retrouve ensuite ma femme et mon beau-frère qui ont fait le déplacement. Que du
bonheur de les avoir auprès de moi et de partager ces instants avec eux.
Bravo à tou(te)s les ami(e)s qui ont
suivi cette ligne bleue aujourd’hui ici à Paris ou à Cheverny avec une mention
spéciale pour Bernard, Roulio et Pierre, néo-marathoniens. Bienvenue dans la
famille les B’ !
Enfin, je voudrais terminer en remerciant
chaleureusement l'IUT Paris Descartes et toutes les personnes qui ont contribué, par un geste ou un don,
à aider l’ARTC et la recherche sur les tumeurs au cerveau. Je ne sais
comment leur exprimer toute ma gratitude. Merci pour votre soutien.
J'ai pris autant de plaisir à lire ton CR que toi en courant ton marathon.On dit que tout effort mérite une récompense.Bravo mon champion,tu l'as bien méritée.
RépondreSupprimerA bientôt
Bizz
C'est gentil Monique. Au plaisir de te voir sous les 4h au prochain!
SupprimerTu es si impressionnante... Bonne récup'
Félicitation Dude! Quel bonheur de te voir aussi à l'aise au 30 eme :-) C'était définitivement TON marathon.
RépondreSupprimerPaix à son âme.
Tu m'as boosté Pathé. Heureux de partager tous ces moments en course ou à l'entraînement avec un pote comme toi. Merci B'
SupprimerBravo Run-O, pour ton CR et ta course réglée comme du papier à musique ! C'est parfait. Que dire de plus... Ah, oui, c'est quand le prochain ;-)
RépondreSupprimerVincent Dogna
Merci Vincent. J'espère que ça sonnera aussi bien à la Rochelle le 24 novembre prochain!
SupprimerJe te contacte bientôt...
Bravo pour cette course magnifiquement gérée et ce négative split!!
RépondreSupprimer3H17'25 pour moi, tu m'as donc doublé dans le final car contrairement à toi je n'avais plus les jambes (gros positive split)...
Bonne récup !!au plaisir de se croiser sur une prochaine course
David
PS:j'ai vu la Tour Eiffel cette année...;)
Bravo David. Super chrono !!!
SupprimerTu devais donc être encore un peu lucide au 29ème pour la voir ;-)
Récupère bien maintenant. J'espère aussi qu'on se croisera sur une prochaine épreuve.
A bientôt,
C'est beau ! Très beau récit. A part te féliciter une nouvelle fois, je ne sais pas quoi dire tellement la fin de ton récit m'a ému. Tu as été très fort ! Chapeau l'ami !
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup d'admiration pour toi, Stéphane. tes défis, ta vision de la CàP, la façon dont tu as repris. Tes compliments me touchent beaucoup. Merci et bravo à toi,
SupprimerTrès beau CR, Renaud. Les aspects techniques ne masquant jamais les aspects émotionnels. Tu rends un bel hommage à ta Maman, elle devait sûrement veiller au grain.
RépondreSupprimerJe suis heureux de constater qu'un petit conseil vaut parfois mieux qu'une profusion. Tu as géré ton affaire de "pied" de maître et si, le début fût un peu laborieux en terme de régularité, tu n'es pas passé d'un extrême à l'autre et de ce fait, tu n'as pas subi ce fameux dernier tiers.
En tout cas, cette "victoire" sans qu'elle soit à mettre à mon profit, me permet (nous permet à nous autres, meneurs d'allure) de me rendre compte qu'on ne fait pas ça pour rien.
D'autres RP t'attendent si tu continues à aborder l'ensemble de tous les aspects d'une prépa et de l'objectif, de la même manière.
Pour ma part, ce fût aussi difficile au début. J'ai perdu 1' dans les 10 premiers kms et je suis resté sur le tempo visé sans chercher à reprendre. Belle aventure encore.
A très bientôt Renaud et Hurrah!
Marcel (Meneur 4H cette année)
Il y a des rencontres qui marquent et j'ai beaucoup appris lors du marathon de Vincennes 2010 en ta compagnie, Marcel.
SupprimerJe ne suis pas surpris de ton choix de ne pas chercher à reprendre cette minute "perdue". Vous nous aidez tellement quand vous restez dans la cible visée, sans changement d'allure!
Bravo à vous tous, les meneurs. A bientôt,
Bravo Renaud !
RépondreSupprimerJe ne savais pas que tu visais un chrono aussi rapide !
En plus te course s'est parfaitement déroulée. ça fait plaisir à voir (et à lire)
Merci Julien !
SupprimerJe suis moi-même un peu surpris, même si ma prépa me laissait espérer un chrono dans ces eaux là. C'est en tout cas mieux que les 3H18 prévus.
Mais bon, c'était un jour "avec", contrairement à Vincennes en octobre dernier. A+
Superbe ! quelle perf' ,...CR super sympa a lire ...et toujours la geste qui "tue" pour les photos ! A bientôt !
RépondreSupprimerOui, Fatiha, toujours! Tant que ça marche en tout cas...
SupprimerMerci et à très vite,
Jacqueline savait lier humilité, modestie et la force dans l'adversité, les qualités d'un vrai marathonien.C'est sûr mon Fils, Elle doit être fière de toi...
RépondreSupprimerMa source d'inspiration...
SupprimerSalut Renaud,
RépondreSupprimerC'est avec plaisir que je lis ton compte-rendu et réalise que nous avons vécu une course quasi similaire, d'où nos chronos identiques.
Vivement la prochaine pour s'y croiser !
Arnaud https://twitter.com/alegrandrunning
Merci, Arnaud. Encore bravo à toi.
SupprimerSi nous arrivons, une prochaine fois, à nous voir dès le début d'une course, nous risquons de passer un bon moment ensemble. Surtout s'il s'agit d'un marathon!
A bientôt j'espère,